Maghreb, Afrique noire et Moyen-Orient font rêver l'industrie musicale


Après l'Asie il y a quelques années, le nouvel eldorado pour les professionnels de la musique enregistrée et de l'édition musicale pourrait bien être les régions du Maghreb, du Moyen-Orient et de l'Afrique noire.

En vue, des centaines de millions de consommateurs potentiels dans des territoires de plus en plus équipés en matière d'ordinateurs et de téléphones portables, de tablettes, etc. Autant d'accès à des services légaux de diffusion en ligne et de téléchargement. Et autant de possibles nouvelles sources de revenus.

Le sujet sera l'un de ceux évoqués lors du Marché international du disque et de l'édition musicale (Midem), prévu à Cannes du 26 au 29 janvier.

Promu, lundi 14 janvier, à la tête des activités mondiales "new business" d'Universal Music Group, la première major du disque, Pascal Nègre a par exemple les yeux qui brillent en évoquant le développement d'un grand marché, du Caire à Johannesburg.

Percée du téléphone portable
Le président d'Universal Music France a gagné le secteur Afrique, gardé le Moyen-Orient et rendu l'Amérique latine. Il partagera son temps entre Paris et le siège d'UMG à Santa-Monica (Californie) et va devoir imaginer de nouveaux modèles économiques.

M. Nègre se veut optimiste, s'appuyant sur la percée du téléphone portable "qui sert à tout, notamment à faire des vidéos, à transmettre la musique" et sur le succès d'une émission de télévision comme "The Voice", produite par Sony Pictures Television et diffusée par la chaîne MBC basée à Dubaï.

La finale, organisée à Beyrouth en décembre 2012, "a rassemblé 120 millions de téléspectateurs arabophones", explique M. Nègre avec délectation. Le vainqueur, le chanteur marocain Mourad Bouriki, y a gagné le droit d'enregistrer un album produit par... UMG.

Deezer en avance
Ces derniers temps, de nombreuses initiatives en matière de distribution et de diffusion numériques ont pu être observées. Ainsi, la société Yala Music, qui présentera samedi 26 janvier au Midem ce qu'elle décrit comme le "premier service légal de musique numérique" au Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

Fondée en mars 2010, Yala Music s'est spécialisée dans la musique arabe, du grand répertoire classique au hip-hop. La société revendique l'accès, sur son site Web ou à partir d'applications pour appareils mobiles, à cent mille titres.

Le service de musique en ligne Deezer, qui revendique son accessibilité dans 160 pays, a intensifié depuis l'été 2012 sa présence en Afrique (Algérie, Maroc, Tunisie, Cameroun, Tchad, Côte d'Ivoire, Gabon, Mali, Sénégal), au Proche et au Moyen-Orient (Egypte, Liban, Syrie, Israël, Jordanie).

Avec son catalogue de 20 millions de titres, disponible à des conditions et avec des limites de temps d'écoute variables selon les pays, Deezer semble avoir pris de l'avance sur certains de ses concurrents.

Pour Yoel Kenan, fondateur et président d'Africori, structure de gestion des droits et de distribution qui met en relation artistes africains et professionnels de l'audiovisuel, créée en décembre 2009 et installée au Cap, à Lagos et Londres, l'arrivée en décembre 2012 d'iTunes, la bibliothèque multimédia numérique du géant Apple, dans douze pays d'Afrique, dont l'Afrique du Sud, est un signe. "En Afrique, Nokia, Samsung et BlackBerry sont très forts. Mais si Apple se montre c'est parce qu'il y a un potentiel", souligne M. Kenan.

La coupe du Monde 2010, le tournant
Avis partagé par Hussain Spek Yoosuf, l'un des responsables de PopArabia, société de gestion des droits numériques, fondée fin 2011.

M. Kenan, qui vient au Midem pour annoncer un partenariat d'Africori avec le géant de l'édition musicale en Afrique du Sud, Gallo Music, fait remonter à la Coupe du monde de football en Afrique du Sud, en 2010, le tournant du développement numérique : "On a quintuplé dans de nombreux pays du continent les tuyaux, le câblage, tout ce qui permet de transporter des données, rappelle-t-il. Les gens accèdent à des débits plus importants, plus rapides."

Si le coût de l'accès à Internet et aux abonnements téléphoniques reste cher en Afrique noire, il serait en diminution régulière.

Mais l'implantation dans ces nouveaux marchés ne se fera pas en transposant tels quels les modèles américain ou européen. Notamment en matière de prix d'abonnement ou d'achat à l'acte, même si une classe moyenne se développe.

La juste rémunération des artistes et le respect du droit d'auteur seront aussi des dossiers sensibles.
Par Véronique Mortaigne et Sylvain Siclier - Source de l’article Le Monde

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