Météo-Vaste étude pour mieux prévoir les orages méditerranéens


Campagne internationale sur les rives de la Méditerranée. Deux mois de collecte de données sur les orages et crues. Programme de recherche coordonné par Météo France et le CNRS.

Avions, bateaux, ballons-sondes, bouées, équipements au sol : plus de 200 instruments sont mobilisés depuis une semaine dans le cadre d'une vaste campagne internationale sur les rives de la Méditerranée afin de mieux prévoir orages et inondations.
Des chercheurs du CNRS et de Météo France coordonnent ce programme qui mobilisera pendant deux mois 400 scientifiques issus d'une vingtaine de pays pour affiner la compréhension des événements météorologiques extrêmes et évaluer la vulnérabilité des populations du bassin méditerranéen aux catastrophes.
Cette étude, organisée dans le cadre du programme de recherche "HyMeX", permettra d'observer la formation de ces "aléas hydrométérologiques extrêmes", et d'analyser la composition des nuages ou encore le débit des crues.
Ce déploiement, "sans précédent" selon les responsables du projet, intervient dix ans après les inondations de 2002 qui avaient fait 24 morts dans le Gard et 20 ans après celles qui avaient tué plus de 40 personnes à Vaison-la-Romaine (Vaucluse).
"Ce qu'on appelle 'épisode cévenol' est une situation commune à tout l'arc latin, qui va de l'Espagne à l'Italie, où se rencontrent des flux marins et des barrières montagneuses", a expliqué lundi à la presse Philippe Drobinski, qui est directeur de recherche au CNRS et l'un des deux coordinateurs d'HyMeX.
"L'objectif d'HyMeX, c'est de surveiller et modéliser le cycle de l'eau pour une meilleure prévision, une meilleure projection climatique des événements extrêmes. (...) C'est aussi d'étudier la vulnérabilité (de la région) et sa capacité d'adaptation à ces événements extrêmes."
HyMeX, projet de recherche qui court sur 10 ans (2010-2020), affiche un budget de 8 millions d'euros hors salaires entre 2010 et 2014. La contribution de la France en personnel s'élève de son côté à 22 millions d'euros sur quatre ans.

Voler dans nuages d'orage
Au centre de coordination du programme, établi dans la salle des fêtes d'un camping de La Grande Motte (Hérault), les hordes de vacanciers ont fait place à un bataillon de climatologues et météorologues qui s'activent autour d'animations satellites.
Chaque matin, une visioconférence avec des équipes de scientifiques basées en Corse, aux Baléares et dans les Abruzzes permet de déterminer les priorités en terme de mesures et de fixer les ordres de mission de deux avions mobilisés pour la campagne de recherche.
À une quinzaine de kilomètres de La Grande Motte, un Falcon 20 et un ATR 42 patientent sur le tarmac de l'aéroport de Montpellier.
Sur la carlingue de l'ATR, un autocollant figure une grenouille fluo: l'avion à hélices est équipé d'un laser "sensible à l'humidité de l'atmosphère" qui analyse la quantité de vapeur d'eau. Une colonne grise traverse la cabine de l'appareil de part en part, permettant au laser d'effectuer ses tirs vers le haut et vers le bas.
"L'objectif, c'est de quantifier la densité d'eau présente dans un nuage, d'estimer le réservoir d'eau", explique Cyrille Flamant, directeur de recherche au CNRS et responsable du volet avions du projet HyMeX.
"Les avions mesurent la température, la pression, l'humidité, la vitesse du vent (...) Parfois, voler dans ces nuages d'orage peut être dangereux. Ça secoue ! Il y a des zones qu'il vaut mieux contourner."

Fiabiliser les radars
Si l'ATR, plus lent, vole dans les couches basses des nuages pour observer la vapeur d'eau, le Falcon s'élève lui davantage pour "caractériser la phase glace des enveloppes nuageuses", poursuit Cyrille Flamant.
Les données obtenues en vol, en mer et au sol permettront aux climatologues, prévisionnistes, hydrologues et sociologues d'améliorer leur compréhension des orages de fin d'été.
"On a des sociologues et des hydrologues qui travaillent sur les questions de coupures d'axes routiers, qui analysent toute la chaîne entre la prévision et les dispositifs d'alerte", précise Véronique Ducrocq, chercheuse à Météo France et également coordinatrice d'HyMeX.
Pour Christophe Bouvier, hydrologue à l'Institut de recherche pour le développement (IRD), les données obtenues sont importantes pour mieux modéliser les crues soudaines et se prémunir contre elles.
"Les estimations de débit sont des éléments essentiels pour le dimensionnement des ouvrages de protection: les retenues, les digues", explique le chercheur montpelliérain.
"Prévoir la pluie, ça ne suffit pas, il faut encore transformer la pluie en débit. Aujourd'hui il y a un certain nombre de lacunes, et les données qui nous manquent, nous sommes en train de les acquérir."
Source de l'article Les Echos

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