2011 : le printemps arabe ? Réflexions égyptiennes

2011 : le printemps arabe ? Réflexions égyptiennes par Samir AMIN.

L’année 2011 s’est ouverte par une série d’explosions fracassantes de colère des peuples arabes. Ce printemps arabe amorcera-t-il un second temps de « l’éveil du monde arabe » ?


Ou bien ces révoltes vont-elles piétiner et finalement avorter – comme cela été le cas du premier moment de cet éveil évoqué dans mon livre L’éveil du Sud. Dans la première hypothèse, les avancées du monde arabe s’inscriront nécessairement dans le mouvement de dépassement du capitalisme/impérialisme à l’échelle mondiale. L’échec maintiendrait le monde arabe dans son statut actuel de périphérie dominée, lui interdisant de s’ériger au rang d’acteur actif dans le façonnement du monde.

Il est toujours dangereux de généraliser en parlant du « monde arabe », en ignorant par là même la diversité des conditions objectives qui caractérisent chacun des pays de ce monde. Je centrerai donc les réflexions qui suivent sur l’Égypte, dont on reconnaîtra sans difficulté le rôle majeur qu’elle a toujours rempli dans l’évolution générale de la région.

Egypte : rétrospective
L’Égypte a été le premier pays de la périphérie du capitalisme mondialisé qui a tenté « d’émerger ». Bien avant le Japon et la Chine, dès le début du XIXe siècle Mohammed Ali avait conçu et mis en œuvre un projet de rénovation de l’Égypte et de ses voisins immédiats du Mashreq arabe. Cette expérience forte a occupé les deux tiers du XIXe siècle et ne s’est essoufflée que tardivement dans la seconde moitié du règne du Khédive Ismail, au cours des années 1870. L’analyse de son échec ne peut ignorer la violence de l’agression extérieure de la puissance majeure du capitalisme industriel central de l’époque – la Grande Bretagne. Par deux fois, en 1840, puis dans les années 1870 par la prise du contrôle des finances de l’Égypte khédivale, enfin par l’occupation militaire (en 1882), l’Angleterre a poursuivi avec acharnement son objectif : la mise en échec de l’émergence d’une Égypte moderne. Sans doute le projet égyptien connaissait-il des limites, celles qui définissaient l’époque, puisqu’il s’agissait évidemment d’un projet d’émergence dans et par le capitalisme, à la différence du projet de la seconde tentative égyptienne (1919-1967) sur laquelle je reviendrai. Sans doute, les contradictions sociales propres à ce projet comme les conceptions politiques, idéologiques et culturelles sur la base desquelles il se déployait ont-elles leur part de responsabilité dans cet échec. Il reste que sans l’agression de l’impérialisme ces contradictions auraient probablement pu être surmontées, comme l’exemple japonais le suggère.

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