Plus d'obstacle financier pour l'Union pour la Méditerranée

Nous n'allons pas en Méditerranée par solidarité mais en tant qu'investisseur de long terme. Nous allons y gagner de l'argent." C'est ainsi que le directeur des affaires européennes et internationales de la Caisse des Dépôts (CDC), Laurent Vigier, explique son engagement pour l'Union pour la Méditerranée (UPM) et plus particulièrement son investissement au sein du Fonds d'infrastructure InfraMed lancé le 26 mai.
Créé à l'initiative de la CDC et de la Cassa Depositi e Prestiti (CDP) qui participent chacune à hauteur de 150 millions d'euros, la Banque européenne d'investissement (BEI) qui investit 50 millions d'euros, la Caisse de Dépôt et de Gestion du Maroc (CDG) qui a alloué 20 millions d'euros et la banque égyptienne EFG Hermes qui a fourni 15 millions d'euros, InfraMed, déjà crédité de 385 millions d'euros, sera le plus important fonds voué aux investissements dans les infrastructures des pays du sud et de l'est de la Méditerranée (Algérie, Egypte, Israël, Jordanie, Liban, Libye, Mauritanie, Maroc, Palestine, Syrie, Tunisie et Turquie).
Un pas de géant alors que l'un des freins de l'UPM était financier (voir notre article du 25 mai dernier). Ainsi, les projets nouveaux d'infrastructures urbaines, énergétiques et de transports durables des pays méditerranéens pourront espérer être financés par InfraMed, dès lors qu'ils répondent à des exigences bien précises en matière de protection de l'environnement, d'impact social, de transparence et de passation de marchés.
Ce fonds s'adressera en priorité aux pays de la région "Mena" (Moyen-Orient et Afrique du Nord) où les taux de croissance urbaine sont les plus élevés du monde. Enfin, InfraMed soutiendra des projets d'investissement à long terme. Des perspectives de longue haleine qui détonnent avec les fonds privés d'investissement dans les infrastructures classiques.
Autre particularité du fonds : prendre une part importante dans chacun des projets afin de participer activement à leur gestion. L'institution espère fournir à ses investisseurs un rendement annuel compris entre 12 et 16%. En outre, le Maroc et l'Egypte se verront allouer chacun au moins 20% de sa dotation et développeront des fonds de co-investissements de 200 millions d'euros minimum
Les projets seront d'abord étudiés par un comité des investissements indépendant. Puis, le conseil des investisseurs s'assurera que les investissements sont engagés conformément aux objectifs d'InfraMed tandis que de son côté, le conseil stratégique délivrera des avis stratégiques à l'équipe dirigeante du fonds. Un modèle unique "sur lequel la Banque mondiale veut prendre exemple", comme nous l'a confié Laurent Vigier. Participant au For'UM qui réunissait plusieurs institutions financières et investisseurs à Marseille le 27 mai, le membre du conseil des investisseurs d'InfraMed a noté l'intérêt des représentants de la Commission européenne qui "envisage un rapprochement avec la BEI et la Banque mondiale afin de créer une structure capable de garantir les investissements dans les pays méditerranéens". "Les premiers projets seront examinés avant la fin de l'année", indique Laurent Vigier.

270 projets en oeuvre
Cependant, l'UPM repose déjà sur plusieurs projets. Lors du For'UM, quelques initiatives ont vu le jour. Parmi elles, le fonds d'amorçage de réalisation et d'orientation (Faro). Doté d'un million d'euros, cet outil pilote a vocation à créer un réseau de fonds en soutien aux entrepreneurs des pays des deux rives de la Méditerranée, en encourageant les PME à investir dans des projets à dimension régionale.
"Le Faro accompagnera les projets de leur phase de concept jusqu'à leurs financements", explique Laurent Vigier. Le directeur des affaires européennes de la CDC est également satisfait de "la deuxième vague du programme Averroès et du lancement de l'étude sur le Fonds Carbone méditerranéen".
"270 projets sont en œuvre dans des domaines comme le transport, les ports, l'énergie…70% seront exécutés dans les pays du Sud", a indiqué le ministre égyptien du commerce et de l'industrie, Mohamed Rachid dans le cadre du For'UM. Ces projets représentent 24 milliards d'euros de promesses de financements. InfraMed doit donc encore mobiliser des fonds supplémentaires pour atteindre son objectif d'un milliard d'euros dans les dix-huit mois qui viennent.
Un pari qui semble réalisable : "Des fonds des pays du Golfe, d'Asie ou d'Amérique du Nord nous ont déjà approchés", confie Laurent Vigier. Une banque méditerranéenne devrait ensuite voir le jour. Charles Milhaud, missionné par le président de la République française, remettra son rapport sur cette institution à venir le 1er juin au président de la BEI.
L'UPM devra ensuite surmonter les difficultés politiques qui la ralentissent. Comme nous l'a indiqué Dominique Vlasto, députée européenne et membre de la délégation à l'assemblée parlementaire euro-méditerranéenne, "les difficultés ne sont pas seulement financières et économiques mais elles sont surtout liées au retard des pays de la rive Sud".
Un retard qui s'explique notamment, selon elle, par le fait que "l'Europe s'est tournée vers l'Est pendant des années. Il faut du temps pour changer de cap".
La députée reste pourtant confiante : "Certains projets comme l'initiative Horizon 2020 qui œuvre pour la dépollution de la Méditerranée avancent bien : je suis sûre que nous allons y arriver."
Par Muriel Weiss - Localtis.info - le 28 mai 2010
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