Marseille, capitale des écrivains méditerranéens

La première édition du salon Ecritures Méditerranéennes vient de se tenir à Marseille les 21 et 22 novembre.
La commissaire du salon Elsa Charbit a réuni une équipe des plus accueillantes et des plus professionnelles. La direction littéraire du salon a été assurée par l’écrivain Pierre Assouline. Ont participé à ce salon des écrivains d’Espagne (Antonio Soler), du Maroc (Tahar Ben Jelloun, parrain de cette édition, Abdelhak Serhane), d’Egypte (Gamal Ghitany), de France (Pierre Assouline, Lydie Salvayre), de Grèce (Takis Theodoroupoulos), de Turquie (Nedim Gürsel), de Tunisie (Jalel El Gharbi, Abdelaziz Kacem), du Liban (Alexandre Najjar), d’Algérie (Abdelkader Djemaï), d’Israël (A.B. Yehushua), du Portugal (Edouardo Lourenço, d’Italie (Andrea Bajani) et les traducteurs Noémi Cingoz, lauréate du prix de traduction, ainsi que Khaled Osman, traducteur égyptien.

Le salon a offert au public deux types de manifestations : des tables rondes et des cafés littéraires. L’un des cafés les plus suivis et les plus agréables a été l’occasion pour Gürsel de retracer sa biographie, ses souvenirs, son parcours, et d’évoquer ses publications, surtout celles qui furent le plus controversées. Le second café, suivi par un grand public, fut animé par Tahar Ben Jelloun, aiguillonné par les questions d’Elsa Charbit puis par celles d’une classe de CM2 de Marseille venue interroger l’auteur de L’Islam expliqué aux enfants.

Les tables rondes, animées par l’écrivain Pierre Assouline, ont porté sur des questions des plus cruciales. La première table ronde porta sur : « Y a-t-il une mémoire méditerranéenne ? » (« Où il s’avère que les écrivains du bassin méditerranéen ont autant d’Histoire que de géographie en commun ») ; la deuxième table ronde était axée sur la question : « Européens ou Méditerranéens ? » (« Où il apparaît que les déçus de l’identité européenne se détournent du côté ombre pour se retourner du côté soleil de leur passé commun »). La troisième table ronde fut sans doute la plus suivie, d’abord pour le thème débattu : « La langue des écrivains fera-t-elle avancer la paix ? », ainsi paraphrasé : « Où l’on se prend à rêver que les réalités de la fiction finissent par s’imposer à celle de la réalité politique », et surtout pour la joute qui a opposé l’écrivain israélien A.B Yehoshua à l’écrivain égyptien Gamal Ghitany. Yehoshua a surtout insisté sur la menace iranienne, la nécessité de la reconnaissance d’Israël par les Palestiniens ; à quoi Ghitany a répondu en affirmant son opposition à un Etat religieux (qu’il s’agisse d’islam, de judaïsme, ou de christianisme), et en déclarant que dans l’état actuel des choses, c’est à Israël qu’il appartient de reconnaître les Palestiniens et non pas l’inverse. Il s’en est pris virulemment au mur : « Donnez-moi l’exemple d’un seul mur qui ait protégé ses constructeurs. »

La question palestinienne semble avoir empêché l’idée d’une union des écrivains méditerranéens, lancée par Pierre Assouline. Nous en sommes à ce point où entre hommes on se comprend, mais entre parties, le désaccord est toujours le même.

La dernière table ronde porta sur « ce que [nos] valeurs et [nos] imaginaires ont en commun », et « où l’on convient que décidément la littérature et la poésie ont parfois la vertu de faire sauter les frontières ». J’ai eu le plaisir de participer à cette dernière table ronde, et d’avoir esquissé une réponse à la question de savoir ce qui fait que le poétique est habilité à nous rapprocher. La question de la liberté d’expression fut également soulevée, notamment concernant l’écrivain italien Antonio Tabucchi.

Le salon n’a pas manqué de susciter des critiques. Celles que j’ai pu recueillir se rapportent à l’absence de représentant de la Palestine, de la Libye, de Malte…, à l’absence des écrivains marseillais, et même des libraires de la ville, et surtout à un manque d’information, de publicité pour le salon. Malgré cela, il fut une véritable réussite.
Par Jalel El Gharbi- Babelmed.net - le 30 novembre 2009

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