IACE - Les journées de l’Entreprise sondent l’Union pour la Méditerranée

Optimisme, scepticisme, réalisme. Ce triptyque a été associé de bout en bout aux approches pour un nouvel avenir entre l’entreprise et l’Union pour la Méditerranée. Il a marqué pour ainsi dire les travaux des 23ème journées de l’entreprise, tenues à Sousse les 27 et 28 novembre 2008 et qui se penchaient sur ce thème majeur. La crise économique mondiale qui se développe dans les pays les plus riches, avec des incidences redoutées par les pays du Sud était également omniprésente.
Les débats ont tenu leurs promesses. Ils ont montré qu’il existe un fossé gigantesque entre les vœux pieux, la volonté de construire une entité solide et le forcing à mener en vue de réaliser cet objectif. Des obstacles de tous ordres se dressent contre la construction de l’espace méditerranéen. La nouvelle énergie, initiée par le président français, Nicolas Sarkozy - la sorko-énergie, comme l’a mentionné Jean Pierre Raffarin - viendra-t-elle à bout de ces difficultés ? D’aucuns l’espèrent. Le projet est conçu dans l’intérêt des deux rives de la Méditerranée.D’innombrables idées ont fusé au cours des journées de l’entreprise. Celles-ci ont rassemblé plusieurs centaines d’hommes d’affaires, d’experts en économie et en finances, de représentants d’ONG, de responsables politiques, de chercheurs et d’universitaires, de journalistes également qui, représentaient les organes de presse de plusieurs pays. Le cadre s’y prêtait. La communication est fluide, grâce à la formule adoptée cette année et qui mettait en présence, dans un panel, des spécialistes qui échangent des idées sur un thème arrêté à l’avance. Un modérateur dirige le débat. Le public peut intervenir et réagir aux propos des "panélistes", abandonnant le statut de simples récepteurs passifs. Plusieurs interventions ont même suscité l’applaudissement nourri de l’assistance. Elles ont enrichi la discussion. L’intérêt est partagé.Plus de 800 participants, à majorité maghrébins, 29 pays représentés, d’éminents spécialistes, une flopée de journalistes reflètent la notoriété acquise par les journées de l’entreprise qui en sont à leur 23ème session. Les thèmes traités au cours de la rencontre justifient amplement la centralité du thème choisi : "L’entreprise et l’Union pour la Méditerranée, approches pour un nouvel avenir". Il a été question de l’ensemble des problèmes qui se posent aux relations d’intérêt qui concernent les 43 pays du bassin méditerranéen.Les sceptiques invoquent la vision de condescendance avec laquelle les Européens regardent les gens du Sud. Ils opposent la désorganisation des pays du Sud qui n’arrivent pas à trouver des motifs d’union et de complémentarité, malgré le voisinage, la culture, la langue et les civilisations communes. Dans ce contexte, le retard qu’accuse la construction du Grand Maghreb Arabe a été jugé comme un handicap à l’avènement de l’UPM, tout comme la fermeture de la frontière terrestre algéro-marocaine.Pour les optimistes, les horizons qu’ouvre la concrétisation de l’UPM sont tellement larges que les obstacles vont s’effacer en un clin d’œil. La "sarko-énergie", évoquée par Jean Pierre Raffarin, ancien Premier ministre français, est toute indiquée pour constituer la locomotive idoine pour la réalisation de l’ensemble méditerranéen.D’un point de vue moins euphorique, nombre d’intervenants ont appelé à créer au préalable les conditions politiques, économiques, culturelles et sociales afin d’opérer un rapprochement progressif entre les citoyens des deux bords. La volonté politique ne peut à elle seule surmonter les obstacles humains et législatifs à un tel regroupement.Andrea Amato, président de l’Institut européen pour la Méditerranée a indiqué que « la volonté politique s’apprécie en fonction des décisions qui sont - ou qui ne sont pas - prises. Il y a le risque que l’on tombe dans la symbolique politique, le passionnel, tout comme c’était le cas, dans la déclaration de Barcelone, où la seule décision concrète a été la création de la zone de libre échange, et tout le reste a été une simple déclaration de principes».Les observations du Premier ministre tunisien et de l’ancien Premier ministre français ne manquent pas de réalisme non plus. Mohamed Ghannouchi, Premier ministre tunisien, a invité les Européens à s’appuyer sur les pays du Sud pour faire face à la crise économique qui gagne les pays occidentaux. Jean Pierre Raffarin estime quant à lui que la crise pourrait constituer un levier pour l’UPM. A ce titre, il a indiqué que « les plans de relance des PME européennes, françaises en particulier, sont étroitement liés à la relance et à la dynamisation du secteur des équipements automobile en Tunisie ».Quant à Moncef Cheikhrouhou, professeur à l’IHEC Paris, il s’est basé sur une projection sur la pénurie de mains d’œuvre en Europe qui sera sensiblement équivalent à la demande d’emploi dans les pays maghrébins.Les sujets débattus, les idées développées, les recommandations formulées, les suggestions avancées, les critiques et les observations émises par les uns et les autres ont contribué à l’enrichissement du débat. Ils participent de cette concertation franche et directe, souhaitée par l’ensemble de la communauté méditerranéenne pour que l’Union pour la Méditerranée puisse se construire sans avatars. Cette dynamique est indispensable si les décideurs politiques et économiques comptent retenir les enseignements des précédentes tentatives de construction d’ensembles solides et efficaces.Il ne fait pas de doute que d’autres rencontres feront avancer le processus. Les entreprises du Sud y trouveront les ressources nécessaires pour se lancer dans la bonne trajectoire. Elles gagneront en maturité, en savoir-faire et en compétitivité. Elles viseront l’unité et la complémentarité, tout en respectant la diversité. Elles participeront activement à l’amélioration de l’environnement des affaires. Elles apporteront leur pierre à la construction de l’édifice méditerranéen. Elles opteront pour un partenariat gagnant-gagnant et traiteront d’égale à égale avec leurs homologues du Nord. De la sorte, le destin de la Méditerranée sera définitivement scellé.
Moncef BEDDA - Businessnews.com.tn - décembre 2008

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